LIVRES / MANGA

Allers et retours du Hobbit – Des mots aux images

DATE DE SORTIE
22/08/2024
DESSIN
Gabriel Amalric (couverture)
AUTEUR
Vivien Lejeune
ÉDITEUR
Third Éditions
TYPE
Critique cinématographique
NOMBRE DE PAGE
208
PRIX
24.90€

Dix ans après le triomphe du Seigneur des Anneaux, le réalisateur oscarisé Peter Jackson retourne en Terre du Milieu afin de porter à l’écran Le Hobbit. La mise en chantier de cette nouvelle trilogie se révèle alors particulièrement chaotique. De procès en menaces, de retards en résignations, ces films oscillent longtemps entre revers et espoirs renouvelés, avant de rencontrer un succès populaire bien plus nuancé que celui de leurs prédécesseurs.

Comment ce « petit livre pour enfants » sorti en 1937 et d’à peine trois cents pages a-t-il pu inspirer au cinéaste néo-zélandais une nouvelle fresque cinématographique aux ambitions aussi épiques et démesurées que celles du Seigneur des Anneaux ? Quand et pourquoi a-t-il éprouvé le besoin de le réinventer à ce point? Par et avec quels moyens ? En remontant jusqu’aux mots de Tolkien pour mieux comprendre les images de Jackson, Vivien Lejeune retrace l’histoire du Hobbit depuis sa genèse au coin du feu de cheminée d’une petite maison d’Oxford à la fin des années 1920 jusqu’à l’avant-première mondiale du film à Wellington. Il interroge, à travers elle, la notion même d’adaptation.

Dans Allers et Retours du Hobbit – Des mots aux images de Third éditions, Vivien Lejeune explore cette œuvre en deux parties bien distinctes. La première, intitulée Livre 1 : Les mots de Tolkien, revient sur le roman original. La seconde, Livre 2 : Les images de Jackson, analyse l’adaptation cinématographique en trois films.

J.R.R. Tolkien est un célèbre écrivain anglais. Il est connu pour avoir créé l’univers de la Terre du Milieu et, plus particulièrement, Le Seigneur des Anneaux. Mais avant cette trilogie, il y a eu Bilbo le Hobbit. C’est un roman unique qui, contrairement à son adaptation cinématographique en trois films, se présente en un seul livre. Mais nous reviendrons sur cet aspect plus tard.

Saviez-vous que Le Hobbit a d’abord été écrit comme un livre pour enfants ? En effet, Tolkien l’a imaginé comme une histoire du soir pour ses propres enfants. Son style est donc plus fluide et accessible que celui du Seigneur des Anneaux ou du Silmarillion.

Si vous ne connaissez ni le livre ni les films, Le Hobbit raconte les aventures de Bilbo, l’oncle de Frodon, bien avant les événements du Seigneur des Anneaux. Installé paisiblement dans son trou de hobbit à Cul-de-Sac, Bilbo voit sa vie bouleversée lorsqu’un magicien, Gandalf, vient lui demander son aide pour une quête inattendue.


J.R.R. Tolkien

Je vais survoler cette partie, qui retrace la vie de Tolkien. Professeur de langues à l’université d’Oxford, il a vécu la Seconde Guerre mondiale. Tandis que ses fils, dont Christopher, ont pris part aux combats avant de rentrer sains et saufs. Tout au long du conflit, il échangeait avec Christopher par correspondance. Il lui envoyait des manuscrits corrigés du Hobbit ainsi que des ébauches de ce qui deviendra Le Seigneur des Anneaux.

Ce lien privilégié explique pourquoi Christopher Tolkien a pris en charge l’héritage littéraire de son père après sa mort en 1973. On apprend également que Le Hobbit a été retravaillé par Tolkien. Et republié en pleine guerre, en 1939, soit deux ans après sa première édition.

Première Diffusion du Hobbit 

À l’automne 1968, la BBC produit huit épisodes radiophoniques qui donnent vie aux aventures de Bilbon Sacquet. Ce qui devient une référence du genre. La production réunit une trentaine de comédiens talentueux. Mais également des effets sonores et spéciaux réalisés en direct. Ainsi que des chants et musiques fidèles à l’esprit du roman. La narration, assurée par Michael Kilgarriff, se distingue par son rythme maîtrisé et son respect évident de l’œuvre originale.

Ces huit épisodes totalisent un peu plus de trois heures trente d’écoute. Ce qui est bien loin des dix heures et quinze minutes nécessaires pour la lecture intégrale du roman en livre audio. Notamment dans la version française interprétée par Dominique Pinon chez Audiolib.

Enregistrement vinyle

En 1952, J.R.R. Tolkien profite d’un séjour chez son ami George Sayer pour enregistrer, pour la première fois, sa propre voix en lisant des extraits de Bilbo le Hobbit et Le Seigneur des Anneaux. Utilisant un magnétophone domestique, il incarne ses personnages avec passion, passant de l’anglais aux langues elfiques et improvisant des mélodies. Séduit par cette expérience, il écrit à son éditeur Rayner Unwin pour proposer ces enregistrements à la BBC. Malheureusement, l’idée ne sera pas retenue.

Ces bandes restent oubliées jusqu’en 1975. C’est alors que HarperCollins et Caedmon Records obtiennent enfin les droits pour les publier sous forme de vinyles. Réorganisées dans l’ordre chronologique des livres, ces archives, bien que partielles, offrent une précieuse immersion dans l’univers de Tolkien. Sa prononciation, son rythme et ses intonations donnent vie aux textes et apportent une dimension émotionnelle unique.

Réédités ensuite en cassettes et CD, notamment en 2001 sous The J.R.R. Tolkien Audio Collection, ces enregistrements sont aujourd’hui une référence pour les amateurs de l’auteur. Ils permettent d’entendre Tolkien lui-même déclamer ses œuvres. Ce qui rend son enthousiasme et sa vision accessibles aux nouvelles générations de lecteurs et passionnés de fantasy.

Film d’animation 

En 1977, Jules Bass et Arthur Rankin Jr. sortent un film d’animation, avec la réalisation confiée au studio japonais Topcraft. Mais ils prennent pas mal de libertés avec le scénario, au point de ne pas suivre le livre à la lettre.

Résultat ? Le film se fait vite démolir par les critiques, qui n’hésitent pas à le qualifier d’« abominable » ou de « gros ratage ». Pourtant, ils semblent oublier un détail important : la cible principale d’une chaîne comme NBC, c’est avant tout les enfants. Exactement comme c’était le cas pour le livre en 1937. Douglas A. Anderson, spécialiste de la fantasy et de Tolkien, va même jusqu’à traiter le film d’« exécrable » dans son Hobbit annoté de 1988.

C’est vrai, l’histoire est simplifiée au maximum. Et plein d’éléments du bouquin passent à la trappe. Il n’y a plus Beorn, Bolg, l’Arkenstone ou le Maître de Lacville. Les rencontres avec Gollum, les gobelins et Smaug sont expédiées. Même la fin originale, avec la vente aux enchères des affaires de Bilbon à son retour, disparaît. Tout doit tenir en moins d’1h30, alors forcément, ça coupe dans le vif.

Ceux qui refusent cette contrainte seront forcément déçus. Mais pour les autres – les enfants ou les spectateurs qui ne cherchent pas absolument à tout comparer au livre – il y a quand même de quoi s’émerveiller. Le film propose une patte graphique originale qui embarque son public dans un premier voyage animé en Terre du Milieu. Et pour ceux qui regrettent une approche plus sombre et adulte, il suffirait peut-être de se rappeler que Le Hobbit, avant Le Seigneur des Anneaux, était surtout une histoire pour enfants. Finalement, ce film est peut-être bien plus inspiré qu’on ne le pense.

Guillermo del Toro

Guillermo del Toro devait initialement réaliser Le Hobbit. Cependant, sa vision s’éloignait de celle de Peter Jackson et des films Le Seigneur des Anneaux. Il voulait créer un film plus proche du conte original de Tolkien, avec une approche plus intimiste et humaine. Tout en mettant l’accent sur la psychologie des personnages plutôt que sur l’épique et l’action grandiose. Son intention était de proposer une bataille des Cinq Armées racontée en rétro-narration, fidèle au livre, et de donner plus de temps à Bilbon et Thorin pour approfondir leurs relations. Bien que ses choix soient bien compris et respectés par l’équipe de scénaristes, les studios souhaitaient une continuité plus marquée avec la trilogie précédente, ce qui a conduit à des tensions en interne.

Finalement, en raison des blocages de production liés aux problèmes financiers de la MGM, del Toro décide de quitter le projet le 30 mai 2010, annonçant son départ sur TheOneRing.net. Il considère que son travail est abouti et que le film est prêt à être tourné, mais ne peut plus attendre indéfiniment le feu vert des studios. Son apport restera néanmoins visible, puisqu’il est crédité comme coscénariste du film. Son départ est un choc pour l’équipe, et Peter Jackson, après plusieurs mois d’hésitation, finit par accepter de reprendre la mise en scène du projet, qui sera finalement divisé en trois films au lieu de deux.

Adaptations de Peter Jackson 

Peter Jackson reprend le projet Le Hobbit après le départ de Guillermo del Toro, mais avec une approche différente. Adapter un livre de 310 pages en trois films de neuf heures implique des ajouts et modifications considérables. Jackson, Fran Walsh et Philippa Boyens choisissent de réinventer Le Hobbit en l’inscrivant dans la continuité de Le Seigneur des Anneaux, en accélérant le rythme et en renforçant le drame. Leur objectif est de transformer ce conte des années 30 en une fresque épique et moderne, quitte à s’éloigner du ton originel. Ils cherchent un équilibre entre fidélité à Tolkien et cohérence avec la première trilogie, tout en assumant des choix radicaux qui ne satisferont pas tous les spectateurs.

Contrairement aux adaptations classiques qui réduisent le contenu des livres, Jackson préfère enrichir Le Hobbit, ajoutant des personnages à peine mentionnés (Radagast), intégrant d’autres issus de l’univers de Tolkien (Legolas) et en créant de nouveaux (Tauriel). Certains événements sont réarrangés, et les récits racontés dans le livre deviennent des flashbacks filmés. Les batailles, autrefois décrites en rétronarration, deviennent des séquences d’action spectaculaires. Malgré ces libertés, Un voyage inattendu respecte presque chaque chapitre du roman, mais Jackson assume que son film est une interprétation plutôt qu’une simple transcription, cherchant avant tout à rester fidèle à sa propre vision artistique.

CONCLUSION

En somme, Le Hobbit de J.R.R. Tolkien, bien qu’écrit initialement comme une histoire pour enfants, pose les bases de l’univers riche et complexe de la Terre du Milieu. À travers les aventures de Bilbo, Tolkien parvient à allier simplicité et profondeur, tout en offrant une lecture plus accessible que celle de Le Seigneur des Anneaux. L’adaptation cinématographique en trois films par Peter Jackson a permis de faire découvrir cette histoire à un public encore plus large, tout en apportant une nouvelle dimension visuelle. À travers Allers et Retours du Hobbit, Vivien Lejeune nous invite à explorer ces deux facettes, les mots de Tolkien et les images de Jackson, pour mieux comprendre l’impact et la magie de cette œuvre intemporelle.

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